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conseiller d'état, grand pyrrhonien, et connu pour tel. Son pyrrhonisme n'empêcha pas qu'on ne lui confiât une éducation si précieuse. On trouve beaucoup de science et de raison dans ses ouvrages trop diffus. Il combattit le premier avec succès cette opinion qui nous sied si mal, que notre morale vaut mieux que celle de l'antiquité.

Son traité de la Vertu des païens est estimé des sages. Sa devise était :

De las cosas mas seguras
La mas segura es dudar.

comme celle de Montaigne était, Que sais - je? Mort en 1672.

VEISSIERES (Mathurin de LA CROZE), né à Nantes en 1661; bénédictin à Paris. Sa liberté de penser, et un prieur contraire à cette liberté, lui firent quitter son ordre et sa religion. C'était une bibliotheque vivante, et sa mémoire était un prodige. Outre les choses utiles et agréables qu'il savait, il en avait étudié d'autres qu'on ne peut savoir, comme l'ancienne langue égyptienne. Il y a de lui un ouvrage estimé, c'est le Christianisme des Indes: ce qu'on y trouve de plus curieux c'est que les bramins croient l'unité d'un Dieu, en laissant les idoles aux peuples. La fureur d'écrire est telle, qu'on a écrit la vie de cet homme en un volume aussi gros que la vie d'Alexandre; ce petit extrait, encore trop long, aurait suffi. Mort à Berlin en 1739.

VERGIER (Jacques), né à Paris en 1675. Il est à l'égard de La Fontaine ce que Campistron est à Racine; imitateur faible, mais naturel. Mort assassiné à Paris par des voleurs, en 1720. On laisse entendre, dans le Moréri, qu'il avait fait une parodie

contre un prince puissant, qui le fit tuer. Ce conte est faux.

VERTOT (René-Aubert), né en Normandie en 1655; historien agréable et élégant. Mort en 1735. k VICHARD DE SAINT-RÉAL (César), né à Chambéri, mais élevé en France. Son histoire de la Conjuration de Venise est un chef-d'œuvre: sa Vie de Jésus-Christ est bien différente. Mort en 1692.

VILLARS DE MONTFAUCON ( l'abbé de ), né en 1635; célebre par le Comte de Gabalis: c'est une partie de l'ancienne mythologie des Perses. L'auteur fut tué, en 1675, d'un coup de pistolet. On dit que les sylphes l'avaient assassiné pour avoir révélé leurs mysteres.

VILLARS (le maréchal, duc de), né en 1652. Le premier tome des mémoires qui portent son nom est entièrement de lui. Il savait par cœur les beaux endroits de Corneille, de Racine et de Moliere. Je lui ai entendu dire un jour à un homme d'état fort cẻlehre, qui était étonné qu'il sût tant de vers de comédie, « J'en ai moins joué que vous, mais j'en << sais davantage ». Mort en 1734.

VILLEDIEU (madame de). Ses romans lui firent de la réputation. Au reste on est bien éloigné de vouloir donner ici quelque prix à tous ces romans dont la France a été et est encore inondée; ils ont presque tous été, excepté Zaïde, des productions d'esprits faibles qui écrivent avec facilité des choses indignes d'être lues par les esprits solides? ils sont même pour la plupart dénués d'imagination ; et il y en a plus dans quatre pages de l'Arioste que dans tous ces insipides écrits qui gâtent le goût des jeunes gens. Morte en 1683.

VILLIERS (Pierre de), né à Coguac en 1648, jėsuite. Il cultiva les lettres, comme tous ceux qui sont sortis de cet ordre. Ses sermons, et son poëme sur l'art de prêcher, eurent de son temps quelque

éputation. Ses stances sur la solitude sont fort auMessus de celles de Saint-Amant, qu'on avait tant vantées, mais ne sont pas encore tout-à-fait dignes d'un siecle si au-dessus de celui de Saint-Amant. Mort en 1728.

VOITURE (Vincent), né à Amiens en 1598. C'est le premier qui fut en France ce qu'on appelle un bel esprit. Il n'eut guere que ce mérite dans ses écrits, sur lesquels on ne peut se former le goût; mais ce mérite était alors très rare. On a de lui de très jolis vers mais en petit nombre. Ceux qu'il fit pour la reine Anne d'Autriche, et qu'on n'im prima pas dans son recueil, sont un monument de cette liberté galante qui régnait à la cour de cette reine, dont les frondeurs lasserent la douceur et la bonté.

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Il fit aussi des vers italiens et espagnols avec succès. Mort en 1648.

(1) Alors on était dans l'usage de retrancher dans les vers les lettres finales qui incommodaient; vous ête pour vous êtes. C'est ainsi qu'en usent les Italiens et les Anglais. La poésie française est trop gênée, et très souvent trop prosaïque.

Ce n'est pas la peine de pousser plus loin cè catalogue. On y voit un petit nombre de grands genies, un assez graud d'imitateurs, et on pourrait donuer une liste beaucoup plus longue des savants. Il sera difficile désormais qu'il s'éleve des genies nouveaux, à moios que d'autres mœurs, une autre sorte de gouvernement, ce donnent un tour nouveau aux esprits. Il sera impossible qu'il se forme des savants universels, parceque chaque science est devenue immense. Ilaudra nécessairement que chacun se réduise à cultiver une petite partie du vaste champ que le siecle de Louis XIV a défriché.

ARTISTES CELEBRES.

MUSICIENS.

La musique française, du moins la vocale, n'a été

jusqu'ici du goût d'aucune autre nation. Elle ne pouvait l'être, parceque la prosodie française est differente de toutes celles de l'Europe. Nous appuyons toujours sur la derniere syllabe; et toutes les autres nations pesent sur la pénultieme ou sur l'antépén ultieme, ainsi que les Italiens. Notre langue est la seule qui ait des mots terminés par des e muets, et ces e, qui ne sont pas prononces dans la déclamation ordinaire, le sont dans la déclamation notée, et le sont d'une maniere uniforme, gloi-reu, victoi-reu, bari ari-eu, furi-eu.............. Voilà ce qui rend la plupart de nos airs et notre récitatif insup portabies à quiconque n'y est pas accoutumé. Lè climat refuse encore aux voix la légèreté que celui d'Italie; nous n'avons point l'habitude qu'on a eue long-temps chez le pape et dans les autres

donne

urs italiennes de priver les hommes de leur vilité pour leur donner une voix plus belle que celle es femmes tout cela, joint à la lenteur de notre hant, qui fait un étrange contraste avec la vivacité e notre nation, rendra toujours la musique franise propre pour les seuls Français.

Malgré toutes ces raisons, les étrangers qui ont té long-temps en France conviennent que nos muiciens ont fait des chefs-d'œuvre en ajustant leurs irs à nos paroles, et que cette déclamation notée a ɔuvent une expression admirable; mais elle ne l'a ue pour des oreilles très accoutumées, et il faut ne exécution parfaite; il faut des acteurs : en Italie I ne faut que des chanteurs.

La musique instrumentale s'est ressentie un peu de la monotonie et de la lenteur qu'on reproche la vocale; mais plusieurs de nos symphonies, et ur-tout nos airs de danse, ont trouvé plus d'aplaudissements chez les autres nations. On les exéute dans beaucoup d'opéra italiens: il n'y en a ›resque jamais d'autres chez un roi qui entretient in des meilleurs opéra de l'Europe, et qui, parmi es autres talents singuliers, a cultivé avec un très rand soin celui de la musique.

LULLI (Jean-Baptiste), né à Florence en 1633, mené en France à l'âge de quatorze ans, et ne sahant encore que jouer du violon, fut le pere de la raie musique en France. Il sut accommoder son art u génie de la langue; c'était l'unique moyen de éussir. Il est à remarquer qu'alors la musique itaienne ne s'éloignait pas de la gravité et de la noble implicité que nous admirons encore dans les réci

atifs de Lulli.

Rien ne ressemble plus à ces récitatifs que le faneux motet de Luigi, chanté en Italie avec tant de S. DE LOUIS XV. 5.

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