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sement pour la cause nationale, furent aussi les premiers à voter d'importans secours; celui du Haut-Rhin donna 300,000 francs pour la construction d'un bâtiment qui portât son nom; le département de la Côte-d'Or fit fondre cent pièces de canon pour les nouveaux armemens. Beaucoup d'autres firent des dons encore plus considérables; on ouvrit des emprunts par souscription volontaire, dont le remboursement fut assuré par une addition aux charges publiques : les villes maritimes, en se résignant aux plus douloureux sacrifices, rivalisèrent d'ardeur et de dévouement.

Pour faire mieux sentir à quel degré d'enthousiasme fut portée l'opinion publique, dans cette circonstance, nous choisissons entre mille témoignages authentiques l'expres sion du vote du conseil municipal et de la chambre de commerce de Bordeaux.

<< S'il faut en croire le cabinet britannique » la France s'isolerait aujourd'hui de son >> gouvernement : d'après ces insulaires, ce » n'est pas la nation tout entière qui s'in

» digne de leur attaque et qui accepte leur >> défi. Nous venons, à la face de l'Europe, », démentir cette perfide imposture; nous ve>> nons démontrer à l'ennemi, que jamais il >> n'exista de concert plus unanime entre la >> France et son gouvernement. En compa>> rant à nos intérêts personnels les sentimens » que nous exprimons, l'Anglais lui-même » se verra forcé d'en reconnaître la sincérité. >> C'est nous qui répondîmes, avec le plus >> entier abandon, à l'appel fait au commerce » de la France; c'est sur nous que vont tom»ber les premières calamités inséparables » d'une guerre maritime. Sur la foi d'un >> traité dont tout nous garantissait la durée, >> nos expéditions se multiplièrent : comme >> dans nos beaux jours, nos vaisseaux furent >> rapidement portés vers les Deux-Indes. La » guerre éclate; une foule de navires sortis » de nos ports y sont encore attendus, et >> laissent nos armateurs partagés entre des » dangers trop réels, et de bien faibles espé>>rances. Leur ruine, citoyen premier Con» sul, sera celle de leur cité. Eh bien ! privés

:

» de tous nos moyens, menacés d'une perte » totale, les habitans de cette cité, le com» merce qui en fut l'ornement et le soutien, » se sentent pressés de vous témoigner leur >> reconnaissance : ils ont vu les sacrifices » que le héros a faits au maintien de la paix; >> ils ont reconnu la 'sage lenteur qui en a » prolongé la durée mais l'honneur et la >> gloire du nom français ont dû mettre » un terme à votre longanimité. Convain» cus que l'ennemi a voulu la guerre, nous >>cessons de calculer les malheurs parti>> culiers qu'elle nous prépare, el nous nous >> empressons de mettre nos bras, nos forces » et nos derniers moyens à la disposition du » vengeur commun. »

Satisfait de ce concours unanime à l'exécution de ses desseins, fier de l'assentiment de la nation, et méditant déjà de le faire servir à son élévation au pouvoir souverain, Bonaparte se hâta de profiter de ces heureuses dispositions. Le vice-amiral Decrès, ministre de la marine, et l'un des plus habiles qu'ait eus la France, mit dans ces apprêts un ordre

admirable, une prodigieuse activité. De nouveaux modèles de bâtimens légers furent construits dans les ports, et à Paris même sous les yeux du premier Consul: il présidait lui-même aux travaux, aux exercices nautiques de sa garde. Il s'instruisait par les rapports et les explications de son ministre şur cette foule d'objets dont se complique l'art naval, et qui, tout minutieux qu'ils puissent paraître, ne sont indifférens qu'aux yeux de l'inexpérience.

Pour exécuter le projet gigantesque de porter le théâtre de la guerre sur les rives de la Tamise, le problème à résoudre pouvait être exprimé de la manière suivante.

1o. Transporter à la fois, et sur une seule flotille, une armée de 100,000 hommes de toutes armes, avec son matériel; c'est-à-dire, son artillerie de siége et de campagne, ses munitions, ses vivres, ses équipages.

2o. Classer, armer, organiser la flotille de telle manière qu'elle pût forcer le passage, quelles que fussent les forces navales qui lui seraient opposées,

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3°. Que le débarquement fût assez prompt pour vaincre dès l'abord toutes les résistances et pour s'affermir.:

Nous allons exposer sommairement les moyens qui furent préparés pour satisfaire à ces trois principales conditions du problème. Nous entrerons ensuite dans les détails de construction et d'armement qui, par leur importance, relativement au but de l'expédition, par la nouveauté d'invention ou sous d'autres rapports, nous ont paru dignes d'être conservés.

L'épreuve faite sur la rade de Boulogne, à la fin de la campagne précédente, des avantages qu'on pouvait retirer de bâtimens de très-petites proportions et d'un faible échantillon, portant cependant quelques pièces d'un fort calibre, pour résister à des forces très-supérieures, suggéra l'idée d'étendre et d'appliquer à l'offensive ces diverses espèces de bâtimens. Jusqu'alors, ils n'avaient été employés qu'à la défense passive des ports, des rades, des anses et des embouchures des fleuves et rivières, et presque toujours à la

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