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ils s'exposent à l'insulte, au pillage, à l'extermination. Les états, enfin, qui ont le malheur d'être en guerre, ne comptent sur aucun principe réciproque de nodération et de justice : tous les liens existant ente eux et les neutres sont rompus; l'approche des ccés, l'accès des ports et des îles, souvent situés à dux cents lieues de la station de leurs escadres, sont iterdits par de simples proclamations.

>> Ainsi, le gouvernement anglais a jusqu'à présent opposé à chaque puissance, selon sa position particulière, une maxime injurieuse à son honneur, et subversive de tous ses droits. Aujourd'hui, il les attaque ensemble, et pour mieux atteindre son but, il adresse ses coups à la morale même, et, si je puis ainsi dire, à la religion du droit public.

» En tout pays et de tout temps, le ministère des agens diplomatiques fut en vénération parmi les hommes: ministres de paix, organes de conciliation, leur présence est un augure de sagesse, de justice et de bonheur. Ils ne parlent, ils n'agissent que pour terminer ou prévenir ces différends funestes, qui divisent les princes, et dégradent les peuples par les passions, les meurtres et les misères que la guerre produit. Tel est le but du ministère diplomatique; et il faut le dire, c'est à l'observation des devoirs qu'il imposé, c'est au caractère généralement respectable des hommes qui exercent ce ministère sacré en Europe, qu'elle doit la

gloire et le bonheur dont elle jouit; mais ces heureux résultats tourmentent la jalouse ambition du seul gouvernement qui se soit fait un intérêt de la ruite, de la honte et de la servitude des autres gouvernehens. Il veut que des ministres diplomatiques soient de instigateurs de complots, des agens de troubles, desrégulateurs de machinations sourdes, de vils espions de lâches embaucheurs; il les charge de fomenter desditions, de provoquer et de payer des assassinats ;'t il prétend couvrir cet infàme ministère du respect t de l'inviolabilité, qui appartiennent aux médiateu des rois et aux pacificateurs des peuples. « Les ministre >> diplomatiques, dit lord Hawkesbury, ne doiven » pas conspirer, dans le pays où ils résident, contre » les lois de ce pays : mais ils ne sont pas sujets aux » mêmes règles à l'égard des états où ils ne sont pas >> accrédités. >> Admirable restriction! l'Europe sera couverte de conspirations, mais les défenseurs du droit public n'auront pas à se plaindre ; il y aura toujours quelque distance locale entre le chef et les complices; les ministres de lord Hawkesbury paieront les crimes qu'ils feront commettre; mais ils auront cette déférence prudente pour la morale publique, de ne pas en être à la fois les instigateurs et les témoins.

>> De pareilles maximes sont le comble de l'audace et de l'hypocrisie. Jamais on ne s'est joué avec aussi peu de pudeur de l'opinion des cabinets et de la

conscience des peuples. S. M. l'empereur pense qu'il est temps de mettre un terme à ce cours désastreux de principes subversifs de toute sociabilité. En conséqueice, vous avez l'ordre de déclarer au gouvernemat près duquel vous résidez, que S. M. ne reconnitra pas le corps diplomatique anglais en Europe tnt que le ministère britannique ne s'abstiendra pas e charger ses ministres d'aucune agence de guerre, t ne les contiendra pas dans les limites de leurs fonctions.

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Les maux de l'Europe ne viennent que de ce qu'on se croit partout obligé à observer des maximes de modération et de libéralité qui, n'étant justes que par réciprocité, ne sont obligatoires qu'à l'égard de ceux qui s'y soumettent : ainsi, les gouvernemens ont autant à souffrir de leur propre justice que de l'iniquité d'un ministère qui ne reconnaît de lois que son ambition et ses fantaisies. Les maux de l'Europe viennent encore de ce qu'on y considère le droit public sous un point de vue partiel, tandis qu'il n'y a de vie et de force que par son intégrité : le droit maritime, le droit continental, le droit des gens ne sont pas des parties du droit public qu'on puisse considérer et conserver isolément : la nation qui prétend introduire dans une de ces parties des règles arbitraires, perd tous ses droits au privilége de l'ensemble: l'infracteur systématique du droit des gens se met de lui-même hors

de ce droit, et renonce à tout intérêt fondé sur le droit maritime et sur le droit continental.

>> S. M. l'empereur regrette d'avoir à ordonner les mesures qui sont une véritable interdiction pronocée contre un état; mais tous les hommes qui réflé chissent n'auront pas de peine à voir qu'en cela il ne fait que constater des faits. Le ministère anglais, par la généralité de ses attentats, a mis les côtes, les îles, les ports, les neutres, le commerce général en état d'interdiction. Récemment enfin il vient de proclamer la prostitution du ministère le plus saint et le plus indispensable à la tranquillité du monde. S. M, croit devoir exciter l'attention de tous les gouvernemens, et les avertir que sans des mesures nouvelles et prises dans le sentiment des dangers présens, toutes les anciennes maximes sur lesquelles se fondent l'honneur et l'indépendance des états, seront incessamment anéanties, Signé, TALLEY RAND.

Le général Moreau au général Bonaparte, premier Consul de la République française.

Au Temple, le 17 ventôse an xri.

(8 mars 1804.)

VOILA bientôt un mois que je suis détenu comme complice de Georges et de Pichegru, et je suis peutêtre destiné à venir me disculper devant les tribunaux du crime d'attentat à la sûreté de l'état et du chef du gouvernement.

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J'étais loin de m'attendre, après avoir traversé la révolution et la guerre, exempt du moindre reproche dincivisme et d'ambition, et surtout quand, à la tête le grandes armées victorieuses où j'aurais eu les moyens de les satisfaire, que ce serait au moment où vivant en simple particulier, occupé de ma famille, et voyant un très-petit nombre d'amis, qu'on puisse 'm'accuser d'une pareille folie. Nul doute que mes anciennes liaisons avec le général Pichegru ne soient les motifs de cette accusation.

Avant de parler de ma justification, permettez, général, que je remonte à la source de cette liaison, et je ne doute pas de vous convaincre que les rapports qu'on peut conserver avec un ancien chef et un ancien ami, quoique divisés d'opinion, et ayant servi des partis différens, sont loin d'être criminels.

Le général Pichegru vint prendre le commandement de l'armée du Nord, au commencement de la campagne de l'an 11. Il y avait environ six mois que j'étais général de brigade. Je remplissais par intérim les fonctions de divisionnaire. Content de quelques succès et de mes dispositions, à la première tournée de l'armée il m'obtint très - promptement le grade que je remplissais momentanément.

En entrant en campagne, il me donna le commandement de la moitié de l'armée, et me chargea des opérations les plus importantes.

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