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PRÉCIS

DES

ÉVÉNEMENS MILITAIRES.

CAMPAGNES DE 1803 ET 1804.

CHAPITRE V.

Nouvelle situation des Puissances. Nou

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xx

veaux intérêts après la rupture de la paix
d'Amiens. Plan de guerre du premier
Consul, offensif et défensif. — Corps d'ar-
mée réuni par le général Murat dans la
Basse-Italie. Mis sous les ordres du
lieutenant-général Gouvion-Saint-Cyr. -
Sa marche et ses opérations. - Occupation
des états de Naples. Dispositions dans
la Haute Italie et sur les côtes de Toscane.
Fortifications d'Alexandrie. -
- Défense

de la Hollande.

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La brusque invasion du Hanovre ayant dis- · sipé les dernières illusions sur la durée de la

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paix, l'esprit des cabinets changea de direction. On a vu que les différentes cours, cédant à la nécessité, ou déterminées par des vues particulières d'agrandissement, s'étaient également résignées à supporter la prépondérance de la France; on eût dit que des siècles écoulés avaient consolidé ses conquêtes et fixé ses destinées. D'illustres infortunes, des pertes irréparables, des malheurs individuels, rappelaient seuls les temps d'anarchie qui avaient épouvanté l'Europe : Bonaparte, en terrassant le monstre, avait aussi enchaîné la liberté; on ne parlait plus de révolution il n'y avait plus de cause commune pour les peuples ni pour les gouver

nemens.

:

Mais aussitôt que l'Angleterre eut relevé l'étendard, on vit renaître de toutes parts les espérances que la fortune avait déçues. Le gouvernement français loin d'assoupir les haines par sa modération, les réveillait au contraire par le dedain des plus justes récriminations contre ses envahissemens: retenus seulement par la crainte dans les liens de son

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ambitieuse politique, les gouvernemens opprimés auraient hautement applaudiau manquement de foi de l'Angleterre, et suivi son exemple, si le mauvais état de leurs finances, l'épuisement des ressources, et le dégoût de ⚫ leurs sujets, ne les eussent contraints à dissimuler.

Quoique les intrigues diplomatiques des deux puissances, pour entraîner les autres dans la guerre, eussent également échoué, la neutralité de celles-ci était fort équivoque. Voici quelle nous semble avoir été l'attitude respective des puissances neutres, à l'époque de l'invasion du Hanovre.

L'Espagne seule entretenait avec la France des relations de bonne intelligence; mais elle était tombée du rang de nation indépendante, et payait chèrement la faveur mendiée par un favori.

Le Portugal, qui avait acheté la paix en sacrifiant une province, toujours menacé par l'Espagne, supportait impatiemment le joug français qui pesait sur toute la péninsule.

L'Empire germanique était ébranlé jusque

dans ses fondemens. L'Autriche, depuis son accession au partage des indemnités, resserrée dans les limites de ses possessions héréditaires, avait perdu son ancienne prépondérance, tandis que le premier Consul s'était fait l'arbitre souverain de l'Allemagne. On conçoit quel dépit, quels regrets devaient agiter la cour de Vienne! quels impatiens désirs de venger une telle flétrissure imprimée à la couronne des Césars!

La Prusse, au lieu de suivre la ligne politique tracée par le grand Frédéric, pour s'emparer peu à peu du protectorat, en se montrant le plus ardent défenseur des droits et des libertés de l'Empire, les avait abandonnés. Elle avait perdu sa considération et son influence pour acquérir quelques misérables districts; la ville impériale de Hambourg avait en vain réclamé son intervention et la garantie de sa neutralité. Enfin l'invasion du Hanovre avait prouvé sa faiblesse et son abais

sement.

Le Danemarck montrait plus d'énergie: le prince royal, dès les premiers mouvemens

des troupes françaises sur les frontières de la Westphalie, avait rassemblé son armée dans le Holstein; mais l'adhésion de la Prusse à l'occupation de l'électorat, et les menaces de la France, rendirent inutile cette généreuse intervention.

La Suède, depuis long-temps isolée des intérêts politiques des autres états sur lesquels elle avait autrefois exercé une influence si extraordinaire, n'était occupée que de ses différends avec la cour de Pétersbourg, sur ses limites en Finlande.

La Russie, la seule puissance qui pût arrêter les vues ambitieuses du gouvernement français, fixait tous les regards. On savait qu'elle avait plusieurs griefs contre la France; qu'elle avait pris de l'ombrage des projets du premier Consul, sur la république des SeptIles, trop indiscrètement annoncés. Le peu de cas de son intervention dans les affaires de Naples, la violation de la neutralité de l'empire germanique par l'occupation du Hanovre et des bouches de l'Elbe et du Weser, avaient excité à Pétersbourg le plus vif

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