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La cour préféra d'abord de continuer la lutte contre une opposition respectable, devenue plus nombreuse et très populaire : la place de principal ministre, et les divers emplois qu'avait occupés M. Pitt, furent offerts à lord Hawkesbury, qui, après avoir consulté ses amis, refusa de se charger d'un tel fardeau et d'une si grande responsabilité : le public applaudit à sa modestie, mais non à son désintéressement, quand on apprit qu'il avait accepté le gouvernement des cinq ports, la plus considérable sinécure qui fût à la disposition de la couronne.

Toutes les tentatives pour former une administration avec les débris de l'ancien ministère ayant échoué, le roi fit enfin appeler près de lui lord Grenville, et le consulta sur la formation d'un nouveau ministère dont il devait faire partie; il répondit ce qu'il avait toujours pensé, disait-il, qu'il fallait établir l'administration sur une plus large base renoncer au principe d'exclusion, et appeler tous les hommes que le pays considérait comme les chefs dirigeant le cours des affai

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res (all the leading men of the country). Sa majesté pressant lord Grenville de lui donner son opinion sur le choix de tels hommes, celui-ci crut qu'il était de son devoir de déclarer que M. Fox était la première personne qu'il consulterait sur cet objet : C'est ce que je pensais, dit le roi, et c'est aussi mon in

tention.

Un changement si prompt et si inattendu dans les sentimens du roi causa autant d'étonnement que de satisfaction; lord Grenville en eut tout l'honneur; il s'empressa de composer, de concert avec M. Fox, une administration digne de la confiance du souverain, et capable de bien servir les intérêts du pays. La base de cette administration d'après le caractère et les opinions de ces deux hommes d'état, ne pouvait être qu'une coalition ou compromis de la nouvelle et de l'ancienne opposition.

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Nous arrêtons pour quelques instans l'attention de nos lecteurs sur cette situation du gouvernement anglais, parce qu'on y trouve, autant que dans les plans encore va

gues de Napoléon, les causes des événemens politiques de cette époque, et parce que, ainsi que le disait l'éloquent historien de CharlesQuint, les événemens d'alors n'avaient pas encore consumé toute leur activité. La nouvelle opposition, dont lord Grenville était le chef, se composait de familles du parti wigh, qui s'étaient séparées de M. Fox au commencement de la première guerre de la révolution, pour porter leur appui aux mesures du gouvernement dans ces conjonctures critiques. Les amis particuliers, les relations très-étendues de la famille de lord Grenville, l'estime générale qu'un grand nombre de personnes avaient pour ses talens et son intégrité, avaient rendu son parti très-considérable et fortement uni.

La vieille opposition comprenait tous les Wighs qui, sans se laisser décourager par la tempête de la révolution française, étaient restés fidèlement attachés à M. Fox, l'avaient soutenu dans sa constante opposition contre la guerre, et n'avaient pas plus dévié que leur illustre chef, des principes de la vraie

liberté; les nombreux amis du marquis de Lansdown, tous ceux qui n'avaient cessé de vouloir la paix et la réforme parlementaire, enfin tous les cliens du prince de Galles, suivaient la bannière de Fox.

Cette vieille opposition était la plus populaire dans la masse de la nation; la nouvelle inspirait en général plus de confiance aux hommes d'un rang élevé et aux propriétaires; toutefois ces deux branches réunies ne pouvaient assurer dans la chambre des communes que cent cinquante voix : c'était assez si l'on pouvait compter sur l'appui sincère et cordial de la couronne; c'était trop peu si cet appui venait à vaciller. MM. Fox et Grenville, ne voulant pas hasarder leur responsabilité, cherchèrent à s'appuyer sur un tiers parti qui pût leur garantir dans la chambre des communes une majorité ferme et indépendante de la cour; ils ne voulurent cependant pas s'associer aucun des anciens ministres, la plupart jugés insuffisan's pour ces hautes fonctions, et qui ne se seraient pas satisfaits d'emplois inférieurs : ils appe

lèrent les lords Sidmouth, Erskine et Ellenborough : le premier, lord Sidmouth, depuis qu'il avait quitté le ministère pour n'avoir pas voulu s'opposer à l'enquête relative à l'administration de lord Melville, avait conservé beaucoup d'amis et d'influence sur les hommes les plus exercés aux affaires, et à remplir les emplois de seconde ligne; il avait toujours manifesté ses dispositions. pour la paix et la réduction des dépenses. Le cabinet fut donc ainsi proposé : lord Erskine, grand chancelier; le comte Fitzwilliam, président du conseil; le vicomte Sidmouth, lord du sceau privé; lord Grenville, premier lord de la trésorerie; lord Howick, premier lord de l'amirauté; le comte de Moira, grand-maître de l'artillerie; M. Windham, secrétaire d'état au département de la guerre; le comte Spencer au département de l'intérieur; M. Fox à celui des affaires étrangères; lord Henry Petty, chancelier de l'échiquier; enfin, lord Ellenborough, chef de justice d'Angleterre. Ce plan d'administration fut présenté par lord Grenville et

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