Imágenes de página
PDF
ePub

fut en effet très-mal accueilli. L'empereur Alexandre, après avoir soumis à l'examen de son conseil ce soi-disant acte de pacification, ainsi que les instructions données à M. d'Oubril, déclara, conformément à l'avis unanime dudit conseil, que ce négociateur s'était écarté de ses instructions, et qu'il avait agi d'une manière directement contraire au sens et au but de la commission à lui conférée; en conséquence, il refusa sa sanction au traité conclu en son nom, et ordonna que le ministre des affaires étrangères donnât connaissance de son refus au gouvernement français et aux membres du corps diplomatique accrédités près sa cour. M. d'Oubril, rayé de la liste des conseillers d'état, fut exilé dans ses terres. Cette punition, si elle fut méritée, était trop mitigée pour convaincre de sa justice. On ne voit pas quelles prétentions eût pu former la Russie, ni quelles autres conditions que celles du traité se seraient mieux accordées, comme le disait son exposé officiel, avec la dignité de sa majesté, ses obligations envers ses alliés, la sûreté

de ses sujets, et la tranquillité générale dé l'Europe.

Pendant les artisans de la guerre ral

que

lumaient ainsi le feu prêt à s'éteindre, Napoléon, plein de confiance, se hâtait de proclamer la paix continentale, et d'en tirer avantage dans sa négociation avec l'Angleterre pour la paix maritime; la paix maritime; il avait permis à M. de Talleyrand de reprendre sa correspondance avec M. Fox dans les premiers jours de juin, se flattant que la paix séparée qu'il allait conclure avec la Russie, ferait tomber par le fait la principale objection à la base proposée.

Les deux ministres dans leurs dépêches (celle de M. de Talleyrand, le 2 juin, et celle de M. Fox, le 14), ne firent guère que répéter leurs dernières propositions, en les appuyant de nouveaux raisonnemens : « Consentir à << traiter sur le principe de vos alliances, di<< sait M. de Talleyrand, et les admettre dans <<< la discussion des intérêts directs et immé<< diats qui nous divisent, c'est plus que les << reconnaître ; c'est en quelque sorte les con

<< sacrer, les cimenter et les garantir.... Nous « ne pouvons céder sur ce point.... » Il proposait ensuite de négocier dans les mêmes formes qu'en 1782; et M. Fox répondait : « Je ne conçois pas comment en traitant avec «<< la Russie et nous conjointement, vous ayez << à reconnaître le principe de l'alliance entre « elle et nous; tout au plus vous ne recon« naissez que le fait. » Quant à la proposition de traiter dans les formes qui eurent lieu en 1782, sous le ministère du marquis de Buckingham, M. Fox, qui occupait alors le même poste aux affaires étrangères, disait avec raison : « Que la France et l'Angleterre «< changent de position, et c'est précisément << celle que j'ai proposée. Nous traitions alors « avec la France et ses alliés ; que la France <<< traite à cette heure avec nous et les nôtres. »

[ocr errors]

On était bien près de s'entendre; les deux ministres, animés du même esprit pour la paix, mettaient le même zèle à aplanir les difficultés. Ils saisirent la première occasion qui se présenta de s'expliquer sur les prétentions réciproques, plus confidentiellement

qu'ils n'avaient pu le faire dans leur correspondance officielle. M. Fox, profitant des dispositions conciliantes et des égards que le gouvernement français lui témoignait personnellement, avait demandé et obtenu, comme une faveur particulière, la liberté de quelques-uns de ses amis retenus prisonniers à Verdun, en représaille des hostilités commises avant la déclaration de guerre', et que par ce motif le gouvernement anglais n'avait pas voulu comprendre dans les échanges: de ce nombre étaient le comte d'Yarmouth et sa famille. Avant son départ pour Londres, il eut avec M. de Talleyrand une conversation dans laquelle ce ministre l'invita à se charger de faire connaître verbalement à M. Fox (et sans que, dans aucun cas, cette communication dút avoir aucune publicité), les sentimens et les vues de la France, aussi bien que l'aperçu des conditions sous lesquelles la paix pourrait être rétablie entre les deux pays. Lord Yarmouth s'acquitta de sa commission, et l'exposé qu'il fit parut si favorable, que le cabinet anglais jugea que

nulle autre personne ne pourrait mieux que le porteur de ces propositions acceptables, en soutenir la base, et en faire valoir les conséquences dans la discussion. Le séjour de la famille de lord Yarmouth à Paris était un motif plausible de son prompt retour, et pouvait servir de voile à sa mission aussi long-temps qu'il serait nécessaire. M. Fox remit à lord Yarmouth un simple billet adressé à M. de Talleyrand, et fit expédier quelques jours plus tard les pleins pouvoirs que ce négociateur ne devait produire qu'à l'ouverture formelle de la négociation. Le billet d'introduction, daté de Londres le 14 juillet, était ainsi conçu : « Monsieur, je ne vous «< écris que deux mots pour vous dire com<< bien je suis satisfait du désir que vous avez « témoigné pour la paix; au surplus, lord «Yarmouth a toute ma confiance; tout ce <«< qu'il vous dira, vous pouvez croire que « c'est moi-même qui vous le dis; le temps

<<< presse.»

Avant d'expédier lord Yarmouth, M. Fox exigea qu'il mît par écrit et laissât entre ses

« AnteriorContinuar »