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tenus par quelques compagnies d'infanterie russe. Le détachement français marcha audevant de cette horde qui poussait d'affreux hurlemens, la chargea, et la poursuivait dans les montagnes, lorsque deux autres bataillons russes vinrent prendre part au combat, et forcèrent le brave commandant français à se replier. Le général Lauriston le fit soutenir; mais voyant les forces des Russes s'accroître, et leur escadre mouillée devant le Vieux Raguse, pendant que des milliers de Barbares inondaient et ravageaient la plaine, il prit la sage détermination de concentrer ses troupes dans la ville; il fit occuper et retrancher la position de Saint-Marc, qui domine la place, et mit quarante pièces de canon en batterie du côté de la mer. Ainsi renfermé dans Raguse, et abondamment pourvu de munitions de guerre, il attendit que le général Molitor eût rassemblé le reste de sa division, et marchât à lui.

Encouragés par ces dispositions purement défensives, et par l'arrivée de l'amiral Senawin, qui réunit toute son escadre au port

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du Vieux Raguse, les alliés (Russes et Mon-
ténégrins) investirent la ville par terre et
par mer, pour intercepter tout secours. Le
blocus dura vingt jours, pendant lesquels
le général Lauriston, redoutant peu l'atta-
de vive force dont l'ennemi le mena-
que
çait, ne sortit pas de ses retranchemens, et
ne s'occupa que de maintenir l'ordre, la ré-
signation et le courage des Ragusains, inté-
ressés à défendre eux-mêmes leurs foyers de
la dévastation et du pillage auxquels ils
voyaient leurs campagnes livrées,

Cependant le général Molitor, déjà arrivé à Stagno, étant en mesure de se concerter avec le général Lauriston, les Russes, qui avaient reçu de nouveaux renforts, et débarqué leur artillerie, resserrèrent leur blocus, établirent de nouvelles batteries, et bombardèrent la place par terre et par mer; ils attaquèrent les hauteurs de Saint-Marc, et furent repoussés. Le général Molitor se mit en marche de Stagno le 4 juillet, avec environ trois mille cinq cents hommes. Il rencontra vis-à-vis la rade de Malfi l'avant

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garde des Monténégrins, qui fut culbutée et jetée dans la mer. Le lendemain il dirigea sa marche vers le canal d'Ombla; et après avoir doublé la baie, malgré le feu des chaloupes canonnières, il découvrit la position de l'ennemi, et fit sur-le-champ ses dispositions d'attaque. La gauche de l'armée russe et monténégrine était flanquée par les vaisseaux et frégates de l'amiral Senawin; la droite était appuyée à des montagnes escarpées à pic, et derrière le front de la ligne qui n'avait pas plus d'un mille d'étendue, deux hauteurs qui la dominaient étaient occupées par trois lignes de Monténégrins. Pendant qu'ils opposaient ces masses de troupes nombreuses, et fortement retranchées, à l'armée de secours, les assiégeans redoublèrent la vivacité de leur feu contre la place; et la canonnade de terre et de mer fut si forte, que les assiégés ne purent entendre l'attaque du général Molitor. Elle fut si bien conduite et si vigoureuse, que la première ligne de l'ennemi, qui s'était ébranlée pour charger les Français, fut en un instant

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défaite, et. jetée, partie sur les vaisseaux, partie sur les hauteurs en arrière. Cette nuée de barbares, poursuivie la baïonnette dans les reins, prit la fuite vers les montagnes. Le camp des Russes, placé sur la dernière hauteur, à l'est de la ville, resta à découvert ils s'y rallièrent en bataillons carrés; mais à l'approche des colonnes françaises, ils se retirèrent précipitamment, et gagnèrent leurs vaisseaux, abandonnant leur artillerie, vingt pièces de canon, six mortiers, des obusiers, des caronades, et une grande quantité de munitions de guerre. Les Mon, ténégrins furent vivement poursuivis; les Russes; dans le désordre de leur embarquement, perdirent beaucoup d'hommes, et laissèrent quelques prisonniers. Le général Molitor arriva le soir même aux portes de Raguse, et dégagea ainsi le général Lauriston.

Pendant ces opérations, une division: de troupes autrichiennes, sous les ordres du général Bellegarde, destiné à reprendre les bouches du Cattaro, pour les remettre aux

Français, était restée au mouillage des îles de Curzola et de Lezina. Ce général ayant fait annoncer l'objet de son expédition au commandant russe, et n'en ayant pas reçu de réponse satisfaisante, s'était rendu de sa personne à Cattaro, n'avait pu lever les dif ficultés de cette reprise de possession, et attendait à Lezina de nouveaux ordres de sa cour. On désirait sincèrement à Vienne de terminer cette affaire à la satisfaction de l'empereur des Français; mais on craignait de s'engager dans des hostilités avec les Russes.

L'occupation de Raguse par les Français choquait l'orgueil de la Porte-Ottomane, dont la protection intéressée soutenait et faisait prospérer cette petite république. L'ambassadeur russe à Constantinople ne négligea pas, par ce moyen, de traverser les vues de Napoléon, et de troubler la bonne harmonie que celui-ci cherchait à rétablir. Depuis que la France était devenue, par l'acquisition de la Dalmatie, une puissance limitrophe des états du grand - seigneur, le titre

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