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Reynier eût voulu manoeuvrer autour de lui au lieu de combattre. Dès qu'il fut averti du débarquement des Anglo-Siciliens, il rassembla à la hâte les forces dont il pouvait disposer, et fit une telle diligence, que dès le 3 juillet son avant-garde se trouva en présence de l'ennemi bivouaqué au pied de la colline de Sainte-Euphémie, appuyant sa gauche au village, et sa droite à la mer.

Le corps du général Reynier se composait seulement de quatre régimens, dont un régiment suisse, à peu près quatre mille cinq cents hommes d'infanterie, un régiment de chasseurs, et une batterie d'artillerie à che val. Cette division passa la nuit du 3 au 4, sur la route de Nicastro, dans le bois de Fondaco-del-Fico. Le lendemain 5, elle déboucha dans la plaine, en continuant de suivre la route au pied des hauteurs de Maida, à la rive gauche de l'Amato.

Le général Stuart n'avait pris position sur la colline de Sainte-Euphémie, et ne s'était éloigné du rivage, en refusant sa gauche, que pour préserver ses troupes des

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exhalaisons pestilentielles de la plaine. Il la quitta dès qu'il vit qu'il allait y être attaqué, se rapprocha du mouillage des vaisseaux, et forma sa ligne de bataille parallèlement au rivage de la mer, appuyant sa droite à celui de l'Amato, vers son embouchure; il répandit sur cette aile, la plus rapprochée des Français, un grand nombre de tirailleurs avantageusement postés dans un petit bois, et dans les broussailles qui bordaient la rive droite de la rivière.

Le général Reynier donna l'ordre au géral Compère, qui commandait la première brigade en tête de colonne, de passer l'Amato, et fit protéger son mouvement par quelques compagnies de voltigeurs, chargées d'éclairer le petit bois et les broussailles. Ces compagnies, accueillies par le feu vif et meurtrier des nombreux tirailleurs de l'ennemi, furent repoussées avant que le géné ral Compère eût achevé de former sa brigade. La canonnade s'engagea, et le général Stuart ayant porté sa ligne en avant, un feu de mousqueterie vif et soutenu, auquel la bri

gade du général Compère, encore dans le désordre d'une formation précipitée, ne pou vait répondre avec la même vigueur, ravagea les rangs des Français. Plus d'un tiers fut moissonné ou mis hors de combat; le général Compère eut le bras cassé pendant qu'il s'efforçait de rallier ses troupes. Le général Reynier ne put les faire soutenir par la seconde brigade, et le reste de sa division encore trop éloignés. Le mouvement rétrograde des troupes de l'avant-garde, jeta la confusion dans celles qui se hâtaient de passer l'Amato; un seul régiment, le 23 d'infanterie légère, commandé par le brave colonel Abbé, tint ferme, et arrêta l'ennemi; mais ce premier échec étant irréparable, le général français ordonna la retraite : elle se fit en bon ordre sur Catauzaro; le 23 régiment, et le 9o de chasseurs à cheval, sous les ordres du général Franceschi, formèrent l'arrière-garde.c

Attaquer, tenter de rejeter dans la mer, avec des forces de moitié inférieures, avec des troupes fatiguées par une marche forcée,

un ennemi dans une forte position, couverte par une rivière, flanquée ou soutenue par les feux d'une escadre, c'était, sans doute, une témérité. Le général Reynier pouvait, peut-être, avec moins de précipitation, se maintenir sur les hauteurs de Maida, observer les mouvemens du général Stuart, en couvrant à la fois la route de Monte-Leone, et la communication avec Catauzaro, attendre qu'on osât l'attaquer, et saisir, pour livrer ou recevoir la bataille, une circonstance plus favorable. Mais il y a telle situation à la guerre, où témérité n'est que sagesse; et si le mouvement insurrectionnel était tellement prononcé que la division française, paralysée par la présence d'une force supérieure, n'eût plus d'autres ressources à espérer du pays que celles qu'elle arracherait par la violence, ne fallaitil pas à tout prix essayer de vaincre l'ennemi avant qu'il se fût affermi, et que la retraite, même hors des Calabres, devînt impossible?

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En effet, le canon de la bataille servit de

signal aux insurgés; le tocsin sonna au même instant dans tous les villages; le drapeau blanc fut arboré sur les clochers; de nombreux détachemens de paysans armés vinrent se rallier à l'armée anglo-sicilienne; l'insurrection devint générale; le cri de mort aux Français retentit de toutes parts; les petits postes établis sur les routes, pour la correspondance, furent égorgés; la populace effrénée, manquant bientôt de victimes, se jeta bientôt sur les plus riches habitans, en les accusant d'avoir favorisé les Français, les massacra, pilla, incendia leurs maisons.

Le général Verdier, qui commandait dans la Calabre citérieure, et occupait avec huit ou neuf cents hommes la ville de Cosenza," ouverte et sans défense, y fut investi par toute la population des environs, et se détermina à l'évacuer à la faveur de la nuit; il repassa le Crati, et se retira sur Cassano. Il ne put entrer dans cette denière ville qu'après en avoir chassé une bande considérable d'insurgés. Les habitans de Cassano, où le prince Joseph avait été reçu,

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