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conquise et dépendante de la France, quelque forme de gouvernement ou plutôt d'administration qui lui fût imposée. Le Danemarck, après s'être généreusement sacrifié pour la défense de la liberté des mers, gardait depuis la mort de l'empereur Paul et le changement de système politique de la cour de Russie, une exacte et circonspecte neutralité. La Suède, au contraire, abandonnant la noble cauise des droits des neutres, s'était livrée à l'Angleterre; son jeune roi, sacrifiant à sa haine personnelle contre Napoléon, les intérêts de son pays, s'était montré en vrai paladin dans la croisade contre la France; mais la diversion à laquelle il devait concourir avec l'élite de son armée et la division russe du comte de Tolstoy, n'avait plus d'objet depuis la défaite d'Austerlitz; l'empereur Alexandre rappelait ses troupes, et les nouvelles dispositions de la Prusse forçaient le roi de Suède à rester inactif à Stralsund, et dans les étroites limites de la Poméranie suédoise.

Dans cette nouvelle situation de l'Europe,

les deux grandes nations rivales triomphaient à l'envi, les Anglais sur la

mer,

les

Français sur le continent; Londres, comme Paris, retentissait des chants de victoire, pendant que les capitales des souverains alliés étaient plongées dans le deuil et la consternation: si la bataille d'Austerlitz avait élevé au-dessus de toutes les autres, la réputation des armes françaises, le combat de Trafalgar avait établi l'incontestable supériorité de la marine anglaise; ces deux batailles avaient soumis le monde entier à la domination de la France et de l'Angleterre. Si ces deux puissances avaient pu s'entendre pour la partager, la paix générale aurait ôté, pour long-temps, à celles que leurs succès sur l'un et l'autre élément opprimaient également, la possibilité de se rele

ver;

il ne leur restait d'autre espoir que la continuation de la lutte engagée entre ces formidables ennemis, dont les vues ambitieuses et diverses dans le but et dans les moyens ne pouvaient se concilier. Quelque brillans que fussent les avantages que la

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France avait acquis dans cette campagne, ceux de l'Angleterre étaient plus solides; celle-ci n'avait plus, comme sa rivale, à combattre pour les conserver, à contenir par la force le ressentiment des souverains humiliés; l'expédition qu'elle avait tant redoutée était désormais impossible; elle pouvait, à son gré, porter ses forces sur tous les points du globe; le commerce maritime de toutes les nations était à sa merci; elle avait atteint le plus haut période de prospérité, et pouvait, dans une entière sécurité, prolonger une guerre, pour elle seule profitable, et susciter de nouveaux orages, au risque même de préparer à Napoléon de nouveaux triomphes.

Dans ce rapide aperçu des résultats du traité de Presbourg, par rapport aux divers états du continent, nous n'avons pas compris le royaume de Naples, cette belle et malheureuse contrée, qui, n'ayant jamais eu d'existence indépendante et vraiment nationale, change de maître selon les caprices de la fortune, et n'est qu'une facile proie pour

levainqueur, dans les querelles les plus étrangères à ses intérêts. Pour la troisième fois, pendant cette guerre, la fausse politique et la perfidie de la cour de Naples firent passer sous le joug des Français ce peuple turbulent qui ne sait que briser le frein des lois, et qui, aussi incapable de connaître ses droits qu'inhabile à les défendre, trompa toujours les voeux des amis de la vraie liberté.

Deux mois s'étaient à peine écoulés depuis la ratification du traité de neutralité, signé à Paris par M. de Talleyrand et le marquis de Gallo, lorsque la cour de Naples, qui l'avait si humblement sollicité, en viola ouvertement toutes les clauses. Elle s'était engagée à ne permettre le débarquement, sur le territoire des Deux-Siciles, d'aucun corps de troupes appartenant aux puissances belligérantes, et à ne confier le commandement de ses propres troupes, et le commandement des places du royaume, à aucun général anglais, prussien, autrichien, russe ou émigré français. Bientôt la belle contenance, et l'espoir des succès de l'archiduc

Charles, dans l'Italie supérieure, et surtout la victoire de l'amiral Nelson au cap Trafalgar, firent changer les dispositions du cabinet napolitain. La reine Caroline, qui le dirigeait, regretta cette neutralité qu'elle avait sollicitée; sa fierté s'irrita de l'impuissance à laquelle elle était condamnée; elle résolut, au mépris de la foi jurée, de seconder les alliés de tout son pouvoir. Nous avons déjà fait connaître, dans le récit des événemens de la campagne précédente, les effets de cette résolution, la nomination du général russe de Lascy, au commandement en chef de l'armée napolitaine, et le débarquement de 14,000 Russes et de 10,000 Anglais, sous la protection d'une escadre des deux nations. Le gouvernement napolitain, ne gardant plus aucune mesure, dédaigna de pallier cette violation par des démonstrations de résistance et de contrainte, et de retenir l'ambassadeur français par des explications qui eussent pu laisser une voie ouverte à la négociation : la reine s'exagé, rant l'avantage de la diversion projetée, et

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