«sonne, les rares qualités de son fils, lui << donna, en cette occasion, les marques les « plus distinguées de son estime et de sa con<< fiance. Il le chargea de tous les soins du « gouvernement, jusqu'à ce que le trouble « et les frayeurs du péril présent fussent « entièrement dissipés; il lui remit les clefs << des cassettes où étoient ses papiers les plus « secrets. Le dauphin, quoique pénétré de « la plus amère douleur, fit un noble effort « sur lui-même, pour ne pas s'abandonner « uniquement à son affliction, afin d'être en « état d'exécuter les volontés du roi; il eut « quelques ordres à donner qui paroissoient << pressans et indispensables, et sur lesquels « il fallut délibérer dans le conseil. Le dauphin rassembla les ministres, qui furent « tous surpris de la manière dont il discuta « les différens avis, qu'il réduisit en peu de << mots, à des points précis dont il alla rendre «< compte au roi. Dans le trouble général « dont la cour étoit agitée, il fut unique

ment occupé de sa douleur et de ses de« voirs, sans se laisser effrayer de l'hor« rible propos qu'il n'ignoroit pas qu'on « prenne garde à M. le dauphin. Il se con« duisit, enfin, dans cette occasion si cri

«tique et si douloureuse, avec toute la sa«gesse et la fermeté d'un grand prince, sans <«< cesser un instant de témoigner au roi le « vif et sincère attachement du fils le plus « tendre et le plus affligé. »

Ces mémoires furent publiés en 1767. M. le dauphin étoit mort le 20 décembre 1765. L'auteur étoit jaloux de sa réputation, il écrivoit sous les yeux de la cour, où tous ces souvenirs étoient récens.

. M. de Voltaire, dans son siècle de Louis XIV, rapporte ce propos: qu'on prenne garde á M. le dauphin; mais il y ajoute ces mots : qu'il ne sorte pas de la journée. Ces paroles étoient d'une trop grande importance pour qu'elles eussent été négligées par un historien qui écrivoit l'histoire du prince, sur l'invitation de madame la dauphine. Il est plus naturel de croire que le propos fut imaginé et propagé par les auteurs du complot, qui, s'il a existé, menaçoit le monarque et la famille royale.

Le roi, silencieux et réservé par caractère, devint sombre et mélancolique. Son visage s'altéra d'une manière sensible; sa peau, vide de chair et privée de ses couleurs, flotta sur ses joues. Ce changement s'opéra en peu d'années,

nées, par une progression non interrompue. Un danger passager ne pouvoit opérer ce changement dans un prince qui savoit braver la mort sur le champ de bataille.

Mais il ne paroît pas que la cour de France ait eu des soupçons sur la maison de Prusse; l'accueil distingué fait au prince Henri, frère de Frédéric, justifie la mémoire de ce monarque; on n'accuse point ses successeurs d'avoir profité de nos dissentions pour accroître, à nos dépens, l'empire fondé par son génie et par sa valeur; et lorsque Frédéric-Guillaume amena ses légions au secours d'un roi malheureux, on ne vit point flotter ses enseignes sur nos citadelles.

LETTRE XI.

Idée de M. de Choiseul, d'après les Mémoires historiques et politiques, comme empoisonneur.- Artifice des coupables, qui rejettent leur crime sur ceux qu'ils redoutent le plus. - Opiniâtreté de l'auteur des Mémoires historiques et politiques ad accuser M. de Choiseul d'avoir empoisonné la reine, le dauphin et la dauphine. -Extrait de ces Mémoires. Mort de madame de Pompadour, qu'elle attribue aux œuvres du duc. Portrait du dauphin. Par qui le duc de Choiseul fait commettre tous ces crimes. Ouverture

du corps de madame la dauphine. N'offre aucun indice de cet attentat. Opinion de Mercier sur tous ces crimes. Ce qu'on doit penser de cette opinion. Artifice de l'auteur des Mémoires historiques pour accréditer les soupçons contre le duc qu'il accuse formellement.- Vraie cause de la mort de madame de Pompadour. · Le duc justifié de cette mort. Idée des

auteurs satiriques.. Révolution qui se

fait dans la personne de Louis xv. Ses causes. Particularités de la maladie. du dauphin. Ses causes. Homicide involontaire qu'il commet sur son écuyer. Ses regrets. Mots touchans de ce prince. L'auteur des Mémoires convaincu d'avoir : supposé plusieurs circonstances démontrées fausses. - Scène touchante entre le roi et le dauphin. Mort édifiante du dauphin. Maladie de la dauphine. Ses causes.org Paradoxe piquant de l'auteur de la Réfutation. L'auteur des Mémoires historiques et politiques confondu par son propre récit. Scène touchante entre Louis XV et Lassone, qui lui apprend la mort de la reine.

QUICONQUE a lu le chapitre ur du premier volume de vos Mémoires historiques et politiques du règne de Louis XVI, ne peut se défendre d'ajouter foi au crime reproché à la mémoire du dac de Choiseul. On ne s'en tient point au doute; on croit avoir une entière conviction. Le nom de ce ministre ne se lit et ne se prononce qu'avec horreur. On voit en lui l'empoisonneur le plus déterminé; et comme ces bruits éclatèrent à la cour lors