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<«<< rangs, c'est ici que les braves trouveront << une mort glorieuse : les lâches iront périr <<< dans les déserts de la Sibérie. » En même temps il fit placer toute l'artillerie de son corps d'armée sur les mamelons entre le bois et Klein - Sansgarten, d'où elle tirait avec beaucoup d'effet sur les masses. Les colonnes prussiennes et russes ne dépassèrent point la lisière du bois; le feu de canon et de mousqueterie s'engagea avec une nouvelle ardeur, et se prolongea bien avant dans la nuit qui fut très-obscure. Le maréchal Davout conserva sa position entre Ancklappen et Lampasch en arrière du bois, mais au-delà de Klein-Sansgarten, et par conséquent encore très - avancée sur l'aile gauche des alliés; ceux-ci firent de vains efforts, et renoncèrent à l'espoir de l'en déposter.

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Vers les huit heures du soir, l'empereur Napoléon ordonna d'allumer sur toute la ligne les feux de bivouac, craignant peu de favoriser par leur clarté la direction des attaques de l'ennemi, et donnant ainsi à ses

braves soldats le signal de la victoire. Le général Benningsen, au contraire, profita de l'obscurité pour dérober sa retraite; il fit cependant un nouvel effort pour soutenir son aile droite attaquée et débordée par le corps du maréchal Ney, comme la gauche l'avait été par le corps du maréchal Davout. En effet, pendant que le corps prussien du général Lestocq défilait, comme nous l'avons dit, pour se porter au secours de l'aile gauche, le maréchal Ney, qui le poursuivait, avait atteint son arrière-garde à Althoff, s'était emparé de ce village et ensuite de celui de Schloditten, où s'appuyait la division Tutschakow, extrême droite de la ligne russe. Le maréchal Soult avait secondé cette attaque en portant sur Schloditten la cavalerie légère de son corps d'armée. Le maréchal Ney poursuivit son avantage en tournant le flanc droit de l'ennemi, et poussa son avant-garde ( le 6a régiment d'infanterie légère et le 39° de ligne) jusqu'à Schmoditten, où elle s'établit. Le général Benningsen, voulant dégager son aile droite, fit attaquer

Schmoditten par une forte réserve de grenadiers formée en colonne serrée. Les deux régimens français la laissèrent approcher jusqu'à bout touchant, et après une seule décharge fondirent dessus à la baïonnette, et mirent complétement en déroute ce qui n'était pas tombé sous leurs coups.

Ce combat fut le dernier et l'un des plus brillans de cette mémorable journée; il décida le général Benningsen à abandonner le champ de bataille, malgré l'avis des généraux Knorring et Tolstoy. Ces deux généraux voulaient profiter de l'avantage remporté par le général prussien à Kuschnitten, et avaient déjà donné l'ordre de former une nouvelle attaque contre la position opiniâtrément défendue et glorieusement conservée par le corps du maréchal Davout. Benningsen, après l'échec de sa réserve de grenadiers à Schmoditten, arrêta cet élan téméraire, fit cesser le feu à dix heures du soir, et donna l'ordre de la retraite.

Vers minuit, le corps prussien du général Lestocq marcha par sa gauche sur Dom

nau et Friedland. L'armée russe prit la route de Königsberg par Mülhausen, passa la rivière de Frisching, et arriva dans la matinée du 9 février au village de Wittemberg.

Les troupes françaises conservèrent pendant la nuit les mêmes positions qu'elles occupaient à la fin de la journée. Napoléon reporta son quartier impérial au bivouac en arrière d'Eylau, sur le plateau de ZiegelHof.

Le lendemain on aperçut au loin, sur la route de Königsberg, les cosaques éclaireurs de l'arrière-garde ennemie. Les Français, maîtres du champ de bataille, recueillirent quelques trophées achetés par des flots de sang seize drapeaux, vingtquatre pièces de canon et beaucoup de caissons. Les pertes des deux armées, autant qu'on puisse les constater d'après les rapports des généraux en chef, furent, du côté des alliés, de cinq à six mille morts, et de vingt mille blessés; et du côté des Français, de deux mille morts, parmi lesquels nous

devons encore citer les colonels Lemarois du 43° et Lacuée du 63° de ligne, et de quinze à seize mille blessés. On fit de part et d'autre peu de prisonniers, parce que les troupes, après avoir supporté impatiemment le terrible feu de l'artillerie tirant à demi-portée et à mitraille, s'abordèrent à la baïonnette aux attaques des villages pris et repris, combattirent avec acharnement, et ne se firent pas de quartier. La rigueur du froid, là difficulté des mouvemens réguliers au milieu des tourbillons et des amoncellemens de neige sur ces lacs glacés, enfin le manque de subsistances, portèrent à l'extrême les fatigues, la constance et la fureur du soldat.

On estima, et il paraît certain qu'en y comprenant les résultats des combats qui précédèrent cette sanglante bataille, les deux armées opposées eurent ensemble plus de soixante mille hommes hors de combat. Dans cette effroyable consommation d'hommes, la perte des alliés, en proportion des forces respectives, dut être de beaucoup la plus considérable. Depuis le 2 février, leur

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