Imágenes de página
PDF
ePub

du général Lestocq, devait déboucher par Mohlsack pour le pousser sur Königsberg, et le séparer entièrement de l'armée du général Benningsen. Voici comment cette combinaison stratégique, l'une des plus belles conceptions de Napoléon, fut exécutée.

Le 10 juin, la réserve de cavalerie sous les ordres du grand-duc de Berg, le corps du maréchal Soult, celui du maréchal Lannes, et les fusiliers de la garde commandés par le général Savary, furent dirigés sur Heilsberg. Le corps du maréchal Davout et celui du maréchal Mortier, destinés à manoeuvrer sur l'aile droite de l'ennemi, vinrent prendre position, l'un à Altkirch, l'autre à Guttstadt; le corps du maréchal Ney et la garde impériale restèrent en réserve. Le 10 au matin l'empereur Napoléon donna l'ordre de marche. La cavalerie du grand-duc de Berg fit l'avant-garde; elle était suivie immédiatement et soutenue par le corps du maréchal Soult. Les Russes avaient évacué les villages de Peterswalden, Zechern et Launau; leur avant-garde occupait le défilé de Bewernic

ken et le rideau qui est entre ce village et le bois dit de Launau. Cette avant-garde, sous les ordres des généraux Barasdin et Lwow, avait été renforcée de cinq bataillons, cinq escadrons et deux batteries. Le grand-duc de Berg la fit attaquer; elle se reploya, sans trop s'engager, et ne fit une vive résistance qu'à la tête du défilé.

L'armée russe se formait, et l'on pouvait juger que le général Benningsen était résolu à recevoir la bataille dans sa position retranchée. Avant de parler des dispositions d'attaque des Français, et pour les faire même entendre, nous allons décrire cette position et la manière dont elle était occupée par l'armée russe.

de

Les hauteurs qui entourent la ville d'Heilsberg sur les deux rives de l'Alle avaient été fortifiées divers par ouvrages campagne appropriés à la nature et aux accidens du terrain; ceux-ci étaient plus favorables à la défense du côté de la rive droite, et cette partie du camp retranché, partagé par la rivière, était aussi la plus forte : celle

de la rive gauche était seulement couverte par trois fortes redoutes entre lesquelles on avait élevé quelques flèches ou redans. Ces ouvrages coupaient les trois routes de Wormditt, Mohlsack et Landsberg. On avait jeté trois ponts sur l'Alle pour faciliter les communications entre les deux rives. Cette position était forte et très-bien. choisie comme tête de la ligne des cantonnemens de l'armée alliée, en opposition à celle de l'armée française sur la Passarge. Aussi long-temps que le corps prussien du général Lestocq se maintiendrait devant Braunsberg en s'appuyant au Frisch-Haff, et conserverait ses communications avec le gros de l'armée russe, le camp retranché d'Heilsberg conservait tous ses avantages, parce que d'une part il couvrait les routes d'Eylau et de Königsberg, et que de l'autre il assurait la retraite et la ligne d'opération sur la frontière de Russie. Mais aussitôt que l'armée française eût débouché en-deçà de la Passarge, et coupé la communication entre le gros de l'armée russe et le corps prussien,

il était évident que la position d'Heilsberg serait attaquée sur la partie la plus faible, la rive gauche, et c'était là le grand défaut de cette position, en la considérant comme champ de bataille.

L'armée russe était forte de cent soixantequinze bataillons, deux cent cinq escadrons russes et vingt- sept escadrons prussiens, sept mille cosaques et quatre mille hommes d'artillerie; en tout environ quatre-vingtquatre mille hommes de toutes armes, répartis, en neuf divisions.

Deux divisions, dont l'une formée par la garde impériale, occupaient sous les ordres du grand-duc Constantin la position sur la rive droite de l'Alle. Les sept autres divisions occupaient la position sur la rive gauche; elles étaient formées sur deux lignes en arrière des redoutes, dont la défense fut confiée au général Kamenskoi lorsqu'il arriva vers midi sur le champ de bataille avec le reste de ses deux divisions. Le général Gortschakow commandait au centre de la ligne de bataille, s'appuyant à l'Alle; l'in

fanterie de l'aile droite était sous les ordres du général Essen; la cavalerie russe et prussienne était en potence, faisant face au village de Grossendorff; enfin les cosaques de l'hettman Platow étaient en avant de l'extrême droite vers Konegen. Divers bouquets de bois étaient garnis de troupes légères, soutenues par quelques bataillons en réserve. La ville d'Heilsberg et les retranchemens de la rive droite étaient occupés par divers corps de la garde impériale.

Telles étaient la position de l'armée russe et son ordre de bataille, lorsque le prince Bagration, qui avait fait l'arrière-garde sur la rive droite et s'était arrêté à Reichemberg, voyant le détachement des généraux Barasdin et Lwow poussé jusqu'à la tête du défilé de Bewernicken, se hâta de passer l'Alle au pont d'Amts pour les soutenir. Il fit établir sur une hauteur, en arrière de Bewernicken, une batterie dont le feu arrêtait dans le défilé la tête des colonnes du maréchal Soult, que le grand-duc de Berg avait dû attendre.

« AnteriorContinuar »