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réserve, sous les ordres du maréchal Lannes, et celui du maréchal Mortier, reçurent ordre de quitter leurs cantonnemens sur la Basse-Vistule, et de joindre l'armée; les divisions de cavalerie quittèrent aussi leurs quartiers d'hiver pour suivre ce mouvement et se réunir sur les points qui leur furent indiqués.

Le plan d'attaque du général Benningsen était bien conçu; la combinaison des mouvemens des différentes colonnes était telle, que s'il réussissait à forcer le passage de la rivière sur les points de Spanden et Lomitten, et à nettoyer toute la rive droite de la Haute-Passarge, le corps du maréchal Ney, attaqué de front par des forces supérieures, pouvait être coupé et détruit en grande partie. Ce premier succès aurait donné aux alliés l'avantage d'attaquer le centre de l'armée française, c'est-à-dire le corps du maréchal Soult, avant qu'il pût être soutenu par celui du maréchal Davout, dont il se serait trouvé séparé, et par les réserves qui, le 5 juin, jour fixé pour l'attaque générale,

étaient encore à deux et trois marches en

arrière de la Passarge.

Cette agression audacieuse, déjà trop différée, pouvait réussir ; mais si elle échouait, soit par la vigueur de la défense des têtes de pont qu'il fallait enlever, soit par le manque de précision et d'accord dans les attaques simultanées, l'empereur Napoléon reprenait à l'instant l'offensive avec une grande supériorité de moyens, et rejetait l'armée alliée dans la position qu'elle venait de quitter sous Heilsberg; position très-forte, sans doute, comme point central d'une ligne de défense; mais qui, sous ce rapport, n'avait sur ses deux ailes aucun appui.

Disons maintenant ce qui se passa dans cette mémorable journée.

La fausse attaque dirigée contre Braunsberg, pour attirer sur cette extrême gauche de la Grande-Armée française l'attention de Napoléon, fut entreprise trop tôt et avant que les autres colonnes se missent en marche. Dès le 3 juin, le général Lestocq, après avoir fait quelques mouvemens devant les

gués de Laack et de Boarden, et sur la tête de pont de Spanden, engagea une canonnade assez vive avec la division du général Dupont, au camp de Zagern. Ces démonstrations n'eurent d'autre résultat que de tenir en alerte les troupes du prince de Ponte - Corvo, et de faire pressentir à ce maréchal l'attaque sérieuse contre laquelle il devait préparer ses moyens de défense. Le général Lestocq ayant reçu le contre-ordre, que le général Benningsen se hâta d'expédier, reploya ses troupes, et différa son attaque jusqu'au jour fixé pour l'attaque générale.

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Le 5 juin, vers neuf heures du matin, deux fortes colonnes russes et prussiennes, avec vingt-neuf pièces de canon, débouchèrent de Wuhsen et de Stegmannsdorff, et se portèrent devant la tête de pont de Spanden. Le général Frère, de la division Villatte, défendait cet ouvrage avec le 27° d'infanterie légère et cinq bouches à feu, dont un obusier; les trois autres régimens de cette division, et le reste de son artillerie, furent répartis sur la rive gauche de la

Passarge, pour soutenir le régiment chargé de la défense de l'ouvrage; le 63° de ligne et le 17° régiment de dragons sur les hauteurs de Spanden, en arrière de la tête de pont; les 94° et 95° de ligne, sous les ordres du général Gérard, à la gauche, entre les villages de Boarden et de Spanden; le 19° régiment de dragons, en avant de Deutschendorff; les 18 et 27° de dragons, en réserve entre Schlodien et la brigade du général Gérard. Le général prussien ouvrit d'abord un grand feu d'artillerie sur la tête de pont, et après deux heures de canonnade, quand il crut que les troupes qui la défendaient étaient ébranlées, il ordonna l'assaut. Le 27° régiment d'infanterie légère, qui bordait le retranchement, attendit jusqu'à bout portant cette attaque impétueuse, et la repoussa par un feu si meurtrier, que trois cents des assaillans restèrent au pied des retranchemens tout le reste prit la fuite, et fut vigoureusement chargé et poursuivi jusqu'au village de Wuhsen par le 17 régiment de dragons conduit par

le général Lahoussaye. Les alliés eurent dans cette affaire sept à huit cents blessés, dont la plus grande partie fut abandonnée sur le champ de bataille.

Le prince de Ponte - Corvo, qui, dès le commencement de l'affaire s'était porté dans les retranchemens, y fut atteint d'une balle à la tête, et forcé de quitter le champ de bataille. Il fut momentanément remplacé par le général Dupont, qui remit le lendemain le commandement du 1" corps au général Victor.

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Pendant que les généraux prussiens, Lestocq et Rembow, exécutaient avec vigueur la fausse attaque sur la Basse-Passarge, et tenaient en échec le corps d'armée du prince de Ponte-Corvo, le corps du général Doctorow attaquait la tête de pont de Lomitten; c'était, à proprement parler, le centre de la ligne française, formé par le corps du maréchal Soult : cette attaque était celle dont le succès importait le plus pour atteindre le but des dispositions générales de Benningsen.

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