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ques à sept où huit lieues à l'environ, et là prenoient et ramenoient à leur ost, chevaux, vaches, brebis, pourceaux et tous autres biens portatifs, dont le pauvre peuple et le pays étoient fort tra

vaillés.

CHAPITRE CLXXXIV.

Comment le dessusdit duc de Bourgogne envoya son héraut à Paris devers le roi; la réponse qu'il eut, et du siége de Mont-le-Héry, et autres matières.

DURANT le temps que ledit duc de Bourgogne étoit logé à l'Arbre-Sec, sur le mont de Châtillon, devant ladite ville de Paris, envoya un sien héraut, nommé Palis, qui depuis fut roi d'armes de Flandre, atout (avec) ses lettres, vers le roi et le dauphin. Mais quand il vint à la porte, fut mené devers le comte d'Armagnac et le conseil du roi, lesquels le firent parler audit dauphin, qui étoit instruit par iceux de la réponse qu'il devoit faire à icelui héraut qui lui bailla ses lettres, pour ce qu'il ne pouvoit parler au roi; et lui dit, en bref, la charge qu'il avoit de par son seigneur le duc. Auquel répondit ledit dauphin, par grand courroux « Hé» raut, contre la volonté de monseigneur le roi et de nous, ton seigneur de Bourgogne jà pieça » a dégâté son royaume en plusieurs lieux. En

:

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>> continuant jusques à maintenant de mal en pis, » il montre mal qu'il soit notre bienveillant, » comme il nous écrit ; et s'il veut que monsei»gneur, et nous, le tenons pour notre parent loyal, vassal et sujet, il aille combattre et débouter le roi d'Angleterre, ancien ennemi de » ce royaume, et après retourne devers monsei» gneur le roi, et il sera reçu. Et ne dis plus que monseigneur le roi et nous soyons en servage à Paris de nulle personne, car nous sommes tous >> deux en notre pleine liberté et franchise; et garde que tu lui dises publiquement devant ses » gens, ce que te disons.

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Après lesquelles paroles, ledit héraut s'en retourna devers son seigneur le duc de Bourgogne, et lui raconta les paroles que lui avoit faites le dauphin, desquelles le duc de Bourgogne ne fit pas grand semblant de courroux, considérant que c'étoit par l'induction de ceux qui gouvernoient

le roi.

En après, ledit duc, voyant qu'il n'entreroit pas dedans Paris, et que ceux à lui favorables ne pouvoient achever ce qu'ils lui avoient mandé, se délogea de l'Arbre-Sec, et s'en alla à (avec) tout son ost mettre le siége devant le châtel de Mont-le-Héry; mais les assiégés, sachant la puissance dudit duc de Bourgogne, pensant qu'ils n'auroient nul secours, firent traiter avec ledit duc, par si qu'ils se partiroient et lui rendroient ladite forteresse en dedans les huit jours ensuivant, au cas que le

roi ou le connétable ne les secourroit. Lequel traité ils firent savoir audit connétable; mais ce rien n'y valut, car ils n'eurent point de secours ; pour quoi ils livrèrent la forteresse audit duc de Bourgogne, comme promis l'avoient.

du

Et pareillement se rendit en l'obéissance du duc de Bourgogne, le château de Marcoussy Dourdan, Palaiseau, et aucunes autres forteresses à l'environ. Et aussi ledit siége de Mont-le-Héry durant, furent envoyés par ledit duc de Bourgogne aucuns de ses gens devant le château Doursay; lesquels se logèrent en la ville et devant ledit châtel; auquel lieu ils affutèrent aucuns canons pour icelle abattre et subjuger. Mais les gens connétable, en grand nombre, vinrent vers le point du jour au logis d'iceux, desquels ils prirent et occirent une grand' partie; et les autres allèrent au logis du duc de Bourgogne, très fort criant à l'arme, et disant que les ennemis venoient en grand' puissance. Pourquoi icelui duc hâtivement se tira en plein champ, et là fit mettre ses gens en bataille, prêts comme s'ils eussent vu leurs ennemis. Et étoient les chefs de ceux qui étoient devant ladite forteresse, le seigneur de Saluste et le seigneur de Thoulongeon, et aucuns autres du pays de Bourgogne; en laquelle escarmouche fut pris messire Geoffroy de Villiers, chevalier de Rethelois, et autres, jusques à cinquante gentilshommes.

Durant lequel temps le duc de Bourgogne en

voya messire Elion de Jacqueville, Jean de Guigny, Jean du Clau et autres capitaines, atout (avec) seize cents combattants, devers la ville de Chartres; laquelle, avec Étampes, Gaillardon, et autres villes et forteresses, se rendirent en l'obéissance du duc de Bourgogne; et en demeura ledit Jacqueville, capitaine et gouverneur.

Et pareillement furent envoyés messire Philippe de Fosseux et Robert le Roux à Auniau, devers la dame de la Rivière, laquelle promit que dedans ses forteresses d'Auniau et de Rochefort ne mettroit nulles gens qui fissent guerre, ni portassent dommage audit duc de Bourgogne, ni à ses bienveillants.

En outre, en ce temps, se mirent diverses villes, forteresses, et aussi plusieurs nobles hommes, en la subjection et sous le gouvernement dudit duc de Bourgogne, sur intention qu'il viendroit à son entente (but) de son entreprise, et auroit le gouvernement du royaume. Auxquelles villes, c'est à savoir celles qui se mettoient en son obéissance ne souffroit payer aucune gabelle, imposition, ni autres subsides, réservé le sel ; et par ainsi acquit grandement la grâce de plusieurs bonnes villes, et du peuple de plusieurs pays.

Auquel temps aussi icelui duc envoya ses lettres à plusieurs bonnes villes du royaume, desquelles la teneur s'ensuit :

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Jean, duc de Bourgogne, comte de Flandre, d'Artois et de Bourgogne, palatin, seigneur de Salmes et de Malines.

<< Très chers et bons amis, vous avez bien su par vraie expérience le très mauvais gouvernement qui de long-temps a été en ce royaume, tant vers la personne de monseigneur le roi et sa domination comme en la chose publique, parce que ceux qui ont pris le gouvernement de mondit seigneur et son royaume, n'ont eu regard à l'honneur appartenant à la majesté royale; mais icelle du tout en tout ont mis en oubli, tellement que mondit seigneur est amoindri de tout son état et de ses richesses, pour lesquelles il doit être renommé devant tous les rois chrétiens. Et sondit royaume, qui souloit être renommé au regard de toutes dominations, et a été jusques à ici maintenu et gardé soigneusement en justice, tant vers le petit comme le grand, le pauvre comme riche, les dessusdits gouverneurs l'ont gouverné à leur plaisir, tellement qu'il ne leur a chalu et encore ne fait fors d'être riches et demeurer en leurs états et offices, tellement que leur ambition et convoitise a été cause de la perdition des dominations que mondit seigneur a perdues et perd chacun jour, de la destruction des nobles morts et détruits par les anciens ennemis de ce royaume, et avec ce des grands finances sans nombre levées par iceux gouverneurs en ce royaume, dont tous les bons sujets de mondit seigneur, les nobles, le clergé, les bourgeois, et le commun peuple de ce royaume, sont peu près tout déserts et détruits. Et pour obvier aux choses dessusdites au bien de mondit seigneur

à

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