Imágenes de página
PDF
ePub

pourquoi le roi Anglois, avec autres choses, fut moult indigné contre eux. Et aussi devant icelle ville fut tué un jeune chevalier, fils du seigneur de Cornouaille, qui étoit cousin-germain du dessusdit roi Henri, et fut tué d'un canon. La mort duquel lui vint à grand' déplaisance, et à tous les princes d'Angleterre ; car, nonobstant qu'il fût jeune d'âge, si étoit-il très sage et prudent.

En outre, après toutes les besognes et continuations dessusdites, environ la fin d'avril, iceux assiégés, qui plus n'avoient, comme dit est, quelque espérance d'avoir secours du dauphin leur seigneur, sachant que longuement ne se pourroient tenir ni défendre contre la puissance du roi d'Angleterre, commencèrent à parlementer pour avoir traité. Et y fut commis de par celui roi son oncle le duc d'Excestre (Exeter), les comtes de Warwick et de Conversan, et messire Gaultier de Hongrefort. Et de la partie des assiégés, messire Philippe Mallet, Pierronde Luppel, Jean d'Aunay, Sinador de Giresmes, le Borgne de Cauchon, Jean de l'Espinache, Guillaume du Fossé; lesquelles parties convinrent ensemble par plusieurs journées, et enfin vinren à conclusion par la manière ci-après déclarée.

Premièrement fut ordonné que l'onzième jour de mai le marché de Meaux seroit rendu et délivré par lesdits assiégés en la main des rois de France et d'Angleterre.

Item, seront rendus et délivrés en la volonté desdits rois messire Louis de Gast, le bâtard de

Vaulru, Jean de Romières, Tromagon, Bernard de Meureville, un qui avoit buisiné (bucciné) du cornet durant le siége, nommé Oraces, et seront mis en justice, laquelle leur sera faite et administrée.

Item, Guichart de Chisay, Pierron de Luppel, maître Robert de Giresmes, Philippe de Gamache et Jean d'Aunay, demeureront en la volonté desdits rois, jusques à tant qu'ils auront rendu ou fait rendre toutes les forteresses, que eux ou leurs commis tiennent en ce royaume ; et après qu'ils les auront rendus auront leurs vies sauves.

Item, tous étant dedans ledit marché, c'est à savoir, Anglois, Gallois, Irlandois, Écossois et autres, qui par avant avoient étéobéissants au roi d'Angleterre, demeureront en la volonté desdits rois.

Item, tous les autres gens, tant gendarmes comme bourgeois et habitants, demeureront en la volonté desdits rois, sauve leur vie.

Item, le comte de Conversan demeurera quitte envers Pierron de Luppel ou autres, à qui ce peut toucher de sa rançon et finance ; et lui promettront de le tenir quitte à toujours, sans fraude ou malengin.

Item, en dedans les huit jours que lesdits assiégés doivent rendre la ville, mettront et feront mettre tous leurs biens généralement en certains lieux, où ils puissent venir à connoissance sans les dégâter ou empirer; et bailleront par parties les inventoires aux commis desdits rois.

Item, mettront et feront mettre les reliques ornements et autres biens d'église en certain lieu, comme dit est.

[ocr errors]

Item, rendront quittes et délivrés tous les prisonniers qu'ils tiennent, tant audit marché comme ès forteresses, et autres lieux à eux obéissants, et les acquitteront de leur foi.

Item, durant les jours dessusdits, ne souffriront homme, de quelque état qu'il soit, se transporter hors dudit marché ; et pareillement n'y en laisseront nuls entrer, sinon qu'ils y soient commis de par lesdits rois.

Item, pour entretenir et accomplir toutes les choses dessusdites sans nulle enfreindre, sur peine de non demeurer en la grâce desdits rois, bailleront lesdits assiégés leurs lettres scellées de leurs sceaux, ou signées de leurs mains jusques à cent des plus notables; desquels vingt-quatre demeureront en ôtage devers lesdits rois ; tels qu'il plaira auxdits rois à demeurer.

Item après ledit traité, fineront et cesseront entre lesdits assiégeants et les assiégés toutes guerres et voies de fait.

Après tous les articles dessusdits accordés et accomplis par les deux parties, demeurèrent en cet état jusques au dixième jour du mois de juin, que les Dauphinois firent ouverture aux commis des rois de France et d'Angleterre ; et leur délivrèrent, par la manière qu'avoit été traité, ledit marché de Meaux. Lesquels commis envoyèrent tantôt

tous les prisonniers sous bonne garde en la ville ; et aucuns des plus principaux furent menés à Rouen, et de là en Angleterre. Et si en y eut une partie inenés à Paris, et emprisonnés en plusieurs lieux. Et pouvoient être tous gens de guerre emprisonnés de sept à huit cents: desquels le bâtard de Vaulru, leur général capitaine fut décolé, par le commandement du roi Henri, et son corps pendu à un arbre au dehors de Meaux, nommé l'arbre Vaulru, auquel ledit Vaulru avoit en son temps fait pendre plusieurs Bourguignons et Anglois, et pour ce étoit icelui arbre ainsi nommé. Et avec ce, lui fut mise la tête sur le bout de l'étendard, et attachée au-dessus de lui à l'arbre dessusdit.

Et après, fit décapiter à Paris messire Louis Gast, Denis de Vaulru, maître Jean de Rouvières, et celui qui avoit sonné le cor durant le siége; et furent mises leurs têtes sur lances ès halles, et leurs corps pendus au gibet par les aisselles. Et tous les biens qui étoient audit marché en très grand nombre, furent distribués du tout au plaisir et pleine volonté dudit roi Henri; lequel, glorieux de sa victoire, entra en moult noble arroi dedans ledit marché. Et y séjourna aucuns jours avec ses princes, pour lui solacier et reposer; et là ordonna en bref de réédifier les portes et murailles de la ville de Meaux et du marché, qui par les gros engins avoient été démolis, et abattus durant ledit siége.

CHAPITRE CCLXX.

Comment, après la rendition dessusdite, plusieurs villes et forteresses se rendirent à icelui roi d'Angleterre, auxquelles il coinmit gens de par lui.

APRÈS la reddition du marché de Meaux, furent mises en l'obéissance du roi Henri plusieurs bonnes villes et forteresses, tant en la comté de Valois comme ès pays à l'environ, par le moyen du seigneur d'Offemont, dessous lequel elles étoient obéissants. Entre lesquelles y furent mises les villes de Crespy en Valois, le châtel de Pierrepont, Merlan, Offemont et aucuns autres. Toutefois demeurèrent audit seigneur d'Offemont ses villes et forteresses; et avec ce, fut mis à pleine délivrance de son corps, par condition qu'il jura la paix finale dernièrement faite à Troyes entre les rois de France et d'Anglegleterre. Et pour ce entretenir bailla pleiges suffisants, c'est à savoir l'évêque de Noyon et le seigneur de Chauny, lesquels pour sûreté ils obligerent corps et biens. Et d'autre côté, rendirent les prisonniers qui avoient été pris dedans Meaux, comme dit est dessus, plusieurs forteresses en l'obéissance des deux rois dessusdits.

En après, quand les capitaines tenant la partie du Dauphin es marches de Beauvoisis, virent et

« AnteriorContinuar »